Psychopompe, d’Amélie Nothomb

Il y a un rendez-vous que je ne manque jamais à chaque rentrée littéraire : la publication du dernier roman d’Amélie Nothomb. Cette fois-ci, je me le suis procuré le lendemain de sa sortie dans les librairies, juste avant d’embarquer dans un train. Sa lecture m’a accompagnée pendant une bonne partie du voyage, ce qui me donne l’occasion de vous publier enfin un billet Croque-Livre.

« Écrire, c’est voler. » J’ai pris automatiquement le roman sans regarder la quatrième de couverture, mais la phrase qui y figure m’aurait encore plus donné envie de le lire immédiatement. Dans ce roman autobiographique, Amélie Nothomb se livre comme jamais elle ne l’a fait auparavant. Elle explique sa fascination pour les oiseaux, née durant son enfance et au cours de ses voyages aux côtés de son père diplomate.

Le roman s’ouvre sur un conte que lui racontait sa nounou japonaise, Nishio-San, et nous emmène ensuite brièvement en Chine, à New York puis au Bangladesh. C’est dans ce pays, à 11 ans, qu’elle développe une obsession pour les oiseaux et qu’elle trouve son totem : l’engoulevent oreillard. La jeune Amélie cherche, elle aussi, à voler. C’est à travers la natation, et plus particulièrement dans le golfe du Bengale, qu’elle a pu se rapprocher de cette sensation :

« Nager, c'était voler sous l'eau. Je ne rapportais pas de pêche, rien ne m'importait que la sensation d'avoir des ailes à la place des bras. » 

Mais c’est là aussi que la jeune Amélie, à l’aube de l’adolescence, fait une chute en plein vol : elle subit l’impardonnable (un viol en réunion) et meurt une première fois. Un an plus tard, l’adolescente de 13 ans découvre le mot « psychopompe », un terme trouvant son origine dans le grec ancien et signifiant « l’accompagnateur des âmes des morts », souvent représenté comme un oiseau. Amélie comprend qu’être psychopompe lui permettrait de ne plus souffrir, de retrouver l’Amélie qui était déjà morte, celle qui existait avant ce traumatisme. Pour y parvenir, elle sait qu’elle doit se rapprocher de la mort. Amélie sombre alors dans l’anorexie, maladie terrible dont elle a risqué ne jamais se relever.

« Une nuit, je sus que la mort était là. Elle s'annonça par un froid inimaginable. »

Ce froid ne la quittera qu’à ses 21 ans, année de son retour au Japon, là où l’écriture deviendra sa façon de voler.

« Désormais, écrire, ce serait voler. Je ne suggère pas que me lire soit un exercice d'altitude, je sais que quand j'atteins mon écriture, je vole. » 

On entre alors dans la carrière d’écrivaine d’Amélie Nothomb, qui débute avec la publication de son onzième manuscrit Hygiène de l’assassin. Sept années plus tard, Amélie se découvre psychopompe à la suite du décès d’une personne très proche. Elle entend cet être cher lui parler depuis l’au-delà et décide de l’accompagner en écrivant. Elle dit d’ailleurs que la mort est présente dans chacun de ses manuscrits et que, lorsqu’elle écrit, sa présence se fait sentir par une chute spectaculaire de sa température corporelle. L’écrivaine ne revient pas sur chacun de ses romans, mais raconte la création de 2 de ses œuvres précédentes qu’elle qualifie de « psychopompe » : Soif, dans lequel elle raconte les derniers moments du Christ avant sa crucifixion, et Premier Sang, livre dédié à son père, qu’elle a écrit tout en sentant la présence de ce dernier, décédé quelques mois plus tôt. Dernier tome de cette trilogie, Psychopompe fait ainsi parler l’Amélie d’avant, oiseau dont l’œuf a éclos de manière extrêmement violente.

Comme l’a expliqué le journaliste Pascal Schouwey lors de la présentation du livre, Psychopompe est « la clé de voûte de la cathédrale Amélie Nothomb », un roman qui permet de mieux comprendre toute l’œuvre de cette écrivaine depuis ses débuts. Bref, si vous aimez la romancière au chapeau noir et aux cheveux d’ébène, vous adorerez Psychopompe.

À propos de Elise Lignian

Traductrice de l'anglais, du russe et de l'espagnol vers le français, je travaille en tant qu'indépendante. Rédaction, correction, révision de traduction et traduction sont les services que j'offre à mes clients. Pour plus d'informations à mon sujet, consultez dès maintenant mon site http://translovart.com.

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