J’avais écrit et programmé mon article de la semaine dernière avant d’apprendre le décès de la reine Elizabeth II. J’allais en effet passer tout mon vendredi dans les transports pour rentrer quelques jours en Belgique. Abasourdie par la nouvelle, je n’ai plus pensé à la publication de mon billet. À quelques jours de son enterrement, j’ai toutefois eu envie de lui consacrer un petit texte cette semaine…
J’ai quitté Londres vendredi matin dans une ambiance très particulière. Dans le métro, les gens étaient particulièrement silencieux. Quelques personnes lisaient l’édition spéciale du journal, remplie de photos de la souveraine, en ayant les larmes au bord des yeux. Arrivée à la gare de Victoria, la nouvelle m’a encore plus percutée lorsque j’ai vu un grand portrait d’Elizabeth II accompagné de son année de naissance et des chiffres fatidiques : 2022. À deux pas de là, une statue de corgi installée en l’honneur de son Jubilé trônait encore au milieu de la gare, rappelant que la reine avait battu tous les records de longévité il y a quelques mois à peine. Je croise quelques personnes avec des bouquets de fleurs ou les épaules drapées des couleurs britanniques, se rendant probablement jusqu’au palais de Buckingham tout proche pour lui rendre hommage. En me dirigeant vers la gare routière, j’ai retrouvé l’une de ses dernières photographies sur plusieurs abribus, remplaçant les publicités habituelles par le sourire discret de la monarque. J’aperçois également le drapeau du National Audit Office tout proche flottant à mi-mât, en signe de deuil. Face à tous ces signes, j’ai moi aussi eu les larmes aux yeux et j’ai quitté Londres en sachant que la ville ne serait plus jamais tout à fait comme avant…
Certes, Elizabeth II n’était pas ma reine, mais elle était LA reine. Comme une très grande majorité de personnes, elle est la seule reine que j’ai jamais connue. Elle était déjà sur le trône depuis longtemps lorsque j’ai eu mes premiers cours d’anglais et que je me suis passionnée pour la langue de Shakespeare. Elle était là lors de mon premier voyage outre-Manche et elle l’était encore lorsque mon cher et tendre s’est installé dans la capitale britannique il y a plusieurs années. J’ai eu la chance de l’avoir aperçue une fois saluer au balcon, alors que je me trouvais au beau milieu de la foule en liesse devant le palais de Buckingham. Cette petite dame aux chapeaux colorés me semblait alors immortelle. C’est stupide quand on y pense, mais je la considérais presque comme un monument de Londres, au même titre que Big Ben ou que le London Bridge. Mais le pont de Londres est finalement tombé et c’est tout un symbole qui disparaît.
Certains vont dire qu’Elizabeth II n’était pas toute blanche (sauf de cheveux 👵...), mais on ne peut rester indifférent à son départ. C’est toute une époque qui s’achève, une époque où une femme était sur le trône. On n’y pense pas tout de suite, mais c’est aussi toute une partie des noms officiels qui se masculinisent, des Queen’s Guards au fameux God Save the Queen, en passant par Her Majesty’s Theatre. En dehors de ces considérations linguistiques, je ne peux pas cacher mon admiration pour cette grande dame. Elle n’a pas choisi sa place, mais elle l’a acceptée en promettant qu’elle consacrerait toute sa vie au service de son peuple. À une époque où l’on passe rapidement à autre chose à la moindre insatisfaction (d'un boulot, d'une rencontre amoureuse, d'une amitié), Elizabeth a respecté sa promesse jusqu’au bout. Deux jours avant son décès, elle se tenait debout dans son salon à Balmoral, frêle mais appuyée fièrement sur sa béquille, les mains bleutées par la vieillesse et les traitements, mais prêtes à serrer celles de la toute nouvelle Première Ministre. Qu’on soit royaliste, antimonarchiste ou totalement neutre, voir cette petite dame s’atteler à son devoir dans les derniers jours de sa vie est un exemple édifiant de ténacité et de dévouement.
Une petite dame, si grande par sa prestance, par sa sagesse, par son élégance bien à elle et son sens de l’humour so British qu’elle va indéniablement me manquer. Alors, au revoir, Votre Majesté et reposez en paix !
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