Ma première lecture de 2022 aura été passionnante et méritait un petit billet Croque-Livre. J’ai eu le plaisir de recevoir à Noël cet essai féministe et je ne peux que le recommander vivement.


Dans cet ouvrage, la journaliste, essayiste et romancière française Titiou Lecoq nous emmène dans un fabuleux voyage dans le temps à la découverte de grandes dames oubliées ou trop peu connues. Des femmes préhistoriques et déesses antiques à Gisèle Halimi et à nos combats d’aujourd’hui, elle raconte les grandes étapes de l’Histoire en rendant hommage à celles dont on ne parle jamais et qui constituent pourtant la moitié de l’humanité. Elle met également à l’honneur de nombreuses historiennes, en appuyant son essai sur leurs recherches.
Avec pédagogie, et une bonne dose d’ironie, elle explique comment la situation féminine a changé à travers les siècles, révèle les injustices que nos ancêtres ont dû subir et dépeint le portrait de véritables héroïnes qui ont eu une vie si extraordinaire que l’on se demande vraiment pourquoi leur nom a été jeté aux oubliettes. On y apprend aussi comment les avancées scientifiques au fil du temps ont changé le rapport entre les hommes et les femmes. Titiou Lecoq nous permet ainsi de redécouvrir l’histoire sous un autre angle.
J’ai appris énormément de choses, comme le fait qu’il existait des chevaleresses, des bâtisseuses de cathédrale et des recluses volontaires. J’ai particulièrement aimé le chapitre 9, « Autrice, oubli d’un mot et d’une profession », qui traite des changements linguistiques survenus au XVIIe siècle, quand l’Académie française a décidé que « le masculin l’emporte sur le féminin, peu importe le nombre ». Titiou Lecoq présente d’ailleurs plusieurs règles linguistiques moyenâgeuses et explique bien que l’idée de l’écriture inclusive, grand sujet de débat chez les linguistes aujourd’hui, n’est pas de « féminiser la langue », mais bien « de la démasculiniser, parce qu’elle a été masculinisée de force ». Elle parle ensuite de la disparition du terme « autrice », mais aussi de l’effacement de cette profession au féminin. On découvre alors l’histoire de Catherine Bernard, « première femme dramaturge jouée à la Comédie-Française ». Bref, je ne vais pas vous raconter tout le chapitre, mais c’est absolument passionnant, tout comme le reste de l’ouvrage.
Elle termine son essai par un plaidoyer pour que les femmes trouvent enfin leur place dans nos manuels d’histoire. Car oui, encore aujourd’hui, les enfants apprennent l’Histoire sous un point de vue essentiellement masculin, dans un monde apparemment peuplé uniquement de rois, de héros et de soldats. « Ceux qui pensent que changer les programmes scolaires est encore une lubie de féministes hystériques, ceux-là ne se sont jamais demandé ce que signifie de grandir avec une histoire dont nos semblables sont exclues. Qu’est-ce que, petite fille, on perçoit quand on ne nous raconte que l’histoire des hommes ? […] C’est maintenant, à l’âge adulte, en découvrant l’histoire de nos ancêtres, de la moitié de nos ancêtres pour être précise, que je réalise la tromperie dont j’ai été victime. La relégation de mes aïeules me met en colère. » Et c’est vrai que l’on a du mal à rester de marbre face à cette injustice. Alors, si l’on peut faire quelque chose à notre échelle pour honorer ces grandes dames, c’est de découvrir leur histoire, notamment à travers cet ouvrage.
Vous l’aurez compris, j’ai adoré cet essai et je vous le conseille chaudement.
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